Aujourd’hui, je souhaite aborder un sujet délicat et douloureux, mais ô combien répandu : l’infidélité respective dans le couple. Au fil de mes recherches et de mes discussions avec mon entourage, j’ai réalisé à quel point cette problématique touchait de nombreux couples. Que ce soit une incartade ponctuelle ou une double vie sur le long terme, l’infidélité fait trembler les fondations même de la relation amoureuse. Après une telle trahison, on peut légitimement se demander si le couple a encore un sens, un avenir. C’est la question que je souhaite explorer dans cet article, en m’appuyant sur des témoignages et l’éclairage de psychologues.
L’infidélité respective, une réalité fréquente aux multiples visages
Les chiffres donnent le tournis : en France, près d’un mariage sur deux se solde par un divorce, et l’infidélité est souvent pointée du doigt comme l’un des facteurs majeurs de rupture. Mais au fait, quand peut-on parler d’infidélité ? La frontière est parfois floue et varie selon les couples. Pour certains, le simple fait de flirter ou d’éprouver une attirance pour quelqu’un d’autre constitue une forme de tromperie. Pour d’autres, seul le passage à l’acte physique compte.
J’ai recueilli plusieurs témoignages qui illustrent différents scénarios d’infidélité :
- Marian, en couple depuis 3 ans, a fini par embrasser un ami proche lors d’une soirée arrosée. Rongée par la culpabilité, elle a avoué sa faute dès le lendemain à son compagnon, qui a rompu, n’arrivant pas à lui pardonner.
- Klara s’est éprise d’un autre homme sur un site adultère alors qu’elle était en couple depuis 2 ans et demi. Cette rencontre lui a fait réaliser qu’il lui manquait quelque chose dans sa relation. Elle a quitté son partenaire sans lui avouer l’existence d’un amant, pour lequel elle a bouleversé sa vie.
- Anna, qui se sentait délaissée par son conjoint, s’est rapprochée d’un ami de longue date avec lequel elle a fini par avoir une liaison. Malgré la culpabilité, ce lien affectif la rendait heureuse. Elle n’a avoué la vérité que 2 ans plus tard, lors d’une dispute, ce qui a précipité leur rupture.
On voit bien que les motivations et les contextes qui mènent à l’adultère sont variés : coup de coeur inattendu, sentiment de solitude dans son couple, besoin de se sentir désiré, désir purement sexuel… Hommes et femmes sont tentés d’aller voir ailleurs pour des raisons souvent différentes. Les hommes invoqueraient davantage un manque de relations sexuelles, tandis que les femmes chercheraient plutôt une connexion émotionnelle. Mais dans tous les cas, l’infidélité est souvent le symptôme d’un profond malaise dans le couple.
Les ravages de la trahison mutuelle sur le plan psychologique
Il ne faut pas minimiser les conséquences psychologiques dévastatrices de l’infidélité respective sur celui ou celle qui est trompé(e). C’est une déflagration qui ébranle tout l’édifice du couple et l’image de soi. La personne trahie se sent profondément blessée, humiliée, remet en question sa propre valeur et sa capacité à être aimée. Toutes ses certitudes volent en éclat.
Certains parlent même d’un véritable traumatisme, avec des symptômes qui s’apparentent à un état de stress post-traumatique : obsession des images de l’adultère, cauchemars, troubles du sommeil et de l’appétit, bouffées d’angoisse, sentiment d’insécurité permanent… La trahison affective et sexuelle laisse des traces durables dans la psyché.
L’estime de soi est la première touchée. On pense qu’on a échoué, qu’on n’a pas su garder son partenaire, qu’on ne le/la mérite pas. Les femmes notamment ont tendance à se dévaloriser physiquement. Les hommes remettent plutôt en cause leurs capacités sexuelles. On développe un sentiment d’insécurité affective, une peur panique d’être abandonné(e) à nouveau. Les doutes et la paranoïa peuvent devenir envahissants.
La confiance est anéantie, le sentiment de sécurité que procurait le couple n’existe plus. Celui ou celle qui a trompé apparaît soudain comme un(e) étranger(ère). Toute la relation passée est réexaminée à l’aune de ce mensonge. On se demande si tout était faux depuis le début, si les moments de bonheur partagés étaient sincères. On cherche désespérément à comprendre pourquoi, à trouver une explication rationnelle à l’innommable.
La colère et la rancœur peuvent être très fortes, allant parfois jusqu’à des pulsions de vengeance. Mais il y a aussi beaucoup de tristesse, un sentiment d’abandon et d’injustice profonde. Toutes ces émotions contradictoires sont épuisantes et peuvent mener à la dépression.
Le processus de reconstruction est long et douloureux. Il faut réapprendre à avoir confiance en soi, en l’autre, en la vie. Réapprivoiser peu à peu l’intimité, surmonter le dégoût, la peur d’être blessé(e) à nouveau. Tout un travail qui nécessite souvent un accompagnement thérapeutique pour éviter de sombrer ou de rester bloqué(e) dans des schémas malsains.
Peut-on reconstruire la confiance et le couple ?
Après un tel séisme, on peut légitimement se demander si le couple a encore un avenir. Est-ce que la confiance peut se reconstruire sur les ruines du mensonge ? Difficile d’être catégorique, chaque couple est unique. Pour certains, l’adultère est une ligne rouge infranchissable, qui signe irrémédiablement la fin de l’histoire. Pour d’autres, c’est une épreuve douloureuse mais surmontable, qui peut même être l’occasion de redéfinir les bases de la relation.
D’après la psychologue Kohn, la capacité d’un couple à rebondir après l’infidélité dépend de plusieurs facteurs :
- La solidité des fondations du couple avant la crise : s’il y avait déjà des failles, des non-dits, des rancoeurs, ce sera plus compliqué que si le socle était sain.
- Les raisons qui ont poussé à tromper : un coup d’un soir lors d’un déplacement professionnel n’a pas le même impact qu’une relation parallèle installée dans la durée. Plus la tromperie a duré longtemps et a impliqué de sentiments, plus elle est difficile à pardonner.
- La réaction du partenaire infidèle : reconnaît-il/elle ses torts ? Exprime-t-il/elle des remords sincères ? Est-il/elle prêt(e) à prendre ses responsabilités et à tout faire pour regagner la confiance ?
- La volonté des deux partenaires de sauver leur couple : il faut être deux pour reconstruire. Si l’un est dans le déni ou le reproche permanent, ça ne peut pas fonctionner.
Dans tous les cas, le chemin est long et semé d’embûches. Pardonner une trahison met du temps, c’est un processus avec des hauts et des bas. Il faut accepter que le couple ne sera plus jamais comme avant. La naïveté et l’insouciance ont disparu, remplacées par un sentiment de fragilité. Mais pour certains couples, cette épreuve devient un nouveau départ, l’occasion de tout remettre à plat.
La thérapie de couple est souvent indispensable pour avancer. Elle permet de verbaliser toute la souffrance et la colère en présence d’un tiers neutre. De comprendre ce qui a amené chacun à faire ce qu’il a fait. De pointer les failles de la relation, les besoins et attentes déçues. Il s’agit de recréer un climat de confiance, étape par étape.
Le partenaire trompé doit réapprendre à faire confiance, le partenaire infidèle doit montrer patiemment son engagement et sa bonne foi. Des exercices concrets peuvent aider : partager ses codes de smartphone pour prouver qu’on n’a rien à cacher, créer de nouveaux rituels de couple, refaire des projets ensemble…
Au fil du temps, la douleur s’apaise, le souvenir de la trahison s’éloigne, perd de sa charge émotionnelle. Un nouveau chapitre s’écrit, fort des leçons du passé. Le couple a changé, mûri, il est passé près de la rupture mais en ressort potentiellement plus solide. Comme l’explique la psychologue de couple Boisson, « une infidélité peut être l’occasion de renforcer le lien, de réinitialiser la relation. À condition que les partenaires aient vraiment compris ce qui s’est joué et aient retrouvé la sécurité affective qui est la base de tout. »
Et quand le couple n’y survit pas…
Mais il faut aussi être réaliste : dans de nombreux cas, il n’est pas possible de se remettre d’une infidélité. La trahison est parfois trop profonde, la confiance définitivement brisée. Lorsque les tentatives de reconstruction échouent, que les non-dits et les rancoeurs persistent, il peut être plus sain de se séparer.
C’est bien sûr un déchirement, un deuil à faire de tous les espoirs qu’on avait mis dans cette relation. On se sent cassé(e), découragé(e), on a l’impression que le monde s’effondre. Mais les relations qui se terminent ne sont pas forcément des échecs. Il faut parfois savoir renoncer pour se reconstruire.
Accepter de tourner la page, c’est refuser de rester enfermé(e) dans la rancune et la position de victime. C’est choisir de reprendre le contrôle de sa vie, même si la route est semée d’embûches. Le soutien des proches, des amis, d’un psy est précieux pour ne pas sombrer.
La rupture peut être l’occasion de faire un bilan, de repenser ses attentes en amour, ses propres failles. De se demander ce qu’on recherchait inconsciemment à travers cette relation. Pourquoi on a laissé passer certains signes, pourquoi on a choisi ce partenaire-là. C’est un travail sur soi difficile mais nécessaire pour espérer un jour re-aimer et refaire confiance.
Dans ce processus, il est important de ne pas idéaliser la relation passée. Oui, il y a eu de beaux moments, mais la trahison a révélé des failles majeures. S’accrocher à une image faussée empêche d’avancer et de s’ouvrir à de futures rencontres. Il faut aussi accepter la part de mystère de l’autre. Chercher une explication à tout prix peut devenir fou. Le comportement de son ex ne nous appartient pas.
Avec le temps, la souffrance s’apaise, sans jamais disparaître totalement. On apprivoise le manque, la solitude. Et peu à peu, la vie reprend ses droits, avec ses nouvelles opportunités. L’espoir renaît de pouvoir aimer à nouveau, peut-être plus lucidement. Car cette épreuve forge et révèle aussi notre force intérieure, notre capacité à rebondir. Elle nous invite à nous recentrer sur l’essentiel : prendre soin de soi, écouter ses besoins profonds, s’entourer de personnes bienveillantes.
L’infidélité mutuelle : une complexité hors norme
Au terme de cette réflexion, force est de constater que l’infidélité mutuelle est une réalité complexe et douloureuse, qui confronte le couple à ses limites. Qu’elle soit le fait d’un seul ou des deux partenaires, elle ébranle la confiance et l’engagement qui sont au cœur du pacte amoureux. Les blessures psychologiques sont profondes et durables.
Pour certains, l’adultère signe la fin de l’histoire, parfois dans la précipitation de la découverte. Pour d’autres, c’est le début d’un chemin de reconstruction semé d’embûches, qui demande une implication totale des deux partenaires et souvent une aide extérieure. Le couple n’en sort pas indemne mais potentiellement plus mature et plus solide.
Dans tous les cas, cette épreuve révèle la fragilité de l’édifice amoureux. Elle interroge la place du désir, de l’engagement, de la liberté dans nos vies. Elle nous rappelle qu’aimer, c’est aussi accepter le risque d’être blessé(e), trahi(e). C’est un saut dans l’inconnu, sans garantie aucune. Mais peut-être est-ce aussi ce qui fait la beauté et l’intensité de l’amour…
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